La santé et la maladie, c’est chose personnelle. Les médecins l’ont oublié.
Jacques Chardonne, Lettre à Paul Morand (1961)
La semaine dernière, j’étais dans l’Eurostar pour aller rendre visite à une amie à Londres. Complètement par hasard, je cherchais un livre pour le trajet au Relay de la gare, et je suis tombé sur L’autre fille d’Annie Ernaux, prix Nobel de littérature 2022. C’est une lettre qu’elle a écrite à destination de sa sœur décédée deux ans et demi avant sa naissance.
En fait, sans aborder du tout la question du témoignage en santé, plusieurs passages de cette lettre illustrent très bien en quoi l’approche narrative en santé est importante, utile mais aussi difficile.
L’approche narrative
J’aimerais commencer en introduisant brièvement ce concept, celui de médecine narrative ou d’approche narrative en santé, qui a historiquement été porté par une professeure et chercheuse de l’Université de Columbia à New York, Rita Charon.
Elle en parle comme d’une manière de « rendre hommage aux histoires des patients ». La médecine narrative se situe à l’intersection de la médecine, de la littérature, de l’éthique et de la psychologie. Cette approche reconnaît que les histoires des patients ne sont pas de simples anecdotes, mais des éléments centraux pour comprendre leur expérience de la maladie et pour guider les soins.
Pour Rita Charon (2001), la médecine narrative nécessite, comme son nom l’indique… des compétences narratives ! C’est-à-dire, selon elle, être capable de « reconnaitre, absorber, interpréter et [être ému ou prendre acte] des histoires d’autrui et de leur détresse ».
Qu’est-ce que cela veut dire ?
- Reconnaitre, d’abord. C’est accepter le patient en tant qu’être sentient, comme être d’expérience qui a une histoire propre à raconter au-delà de la simple énumération d’une liste de symptômes. La personne porte en elle une histoire naturelle du bouleversement de sa trajectoire de vie. Cela implique aussi de voir, au-delà de l’histoire, les faits, car il ne s’agit pas d’un récit de fiction. Reconnaître, c’est donc aussi reconnaître la réalité et la véracité du récit.
- Absorber, c’est parvenir à créer un espace sécurisant dans lequel le récit puisse être recueilli et surtout accueilli par un soignant qui se place à une distance moins importante de son patient qu’habituellement : à savoir, ici, dans une relation horizontale et non verticale. Cette dernière étant souvent critiquée par l’exclusion de fait qu’elle induit, en séparant de manière stricte la connaissance médicale et les savoirs expérientiels. Absorber, c’est aussi s’approprier ce récit, entrer en empathie avec le patient et son histoire, et étudier les émotions que ce récit provoque au soignant.
- Savoir interpréter, c’est ne pas se ruer sur des conclusions hâtives issues de ses propres préjugés et biais venant combler des informations manquantes dans le discours. En effet, le patient lui-même peut parfois ne pas parvenir à donner un sens immédiat à son récit, ne pas trouver les mots, ou simplement laisser de côté des éléments qui lui paraitront de prime aborde futiles.
La médecine narrative se veut plus humaine, plus respectueuse, plus empathique, ipso facto plus efficace également, que la médecine classique, je me hasarde à dire la médecine froide, qui, elle, est ancrée dans un modèle strictement biomédical où seule la sémiologie est importante et où les seuls ennemis à abattre sont les symptômes.
Pourtant, ces symptômes s’inscrivent dans un contexte, dans une histoire, unique, propre à la personne. Canguilhem, dans Le Normal et le Pathologique, a défini que le pathologique n’est pas une simple variation quantitative par rapport à la norme mais une variation qualitative, une expérience en soi. Il écrit à ce sujet que « c’est d’abord le malade qui a constaté un jour que quelque chose n’allait pas ».
La maladie est plus qu’une liste de symptômes, elle se vit avant tout.
Une question de sens
On peut même revenir à l’étymologie du mot « maladie ». Concrètement, la maladie renvoie à un état dans lequel on se sent mal, le male habitus, littéralement le mauvais état en latin. Être mal.
La langue française ne nous aide pas vraiment, en ce que nous n’avons qu’un seul et même mot pour exprimer plusieurs concepts à vrai dire sensiblement différents. En anglais, la maladie se traduit par 3 mots distincts : disease, la maladie objective ; illness, la maladie vécue subjectivement ; sickness, les implications sociales de la maladie. On parlera par exemple de sick leave pour le congé maladie, tandis qu’on traitera une disease. On voit mieux toute l’envergure qu’a le processus pathologique. C’est un processus dynamique, envahissant, avec des hauts et des bas, parfois même une fin. C’est un processus qui renvoie à des émotions, souvent négatives.
Alors, à quoi bon ressasser ces mauvais souvenirs pour les mettre en récit ? Y a-t-il vraiment un avantage à les coucher sur le papier, ou à les exprimer verbalement, parfois à un moment où la mort est proche ? Qui a envie de repenser in extenso à son compagnonnage avec un ennemi quand celui-ci est sur le point de nous vaincre ?
À quoi cela peut-il bien servir ?
En finir avec le flou
Expérience à part entière, comme on raconterait à ses petits-enfants son parcours professionnel ou son enfance durant la guerre, il s’agit de transmettre cette histoire durant laquelle la personne, non seulement avait une maladie, mais aussi était, se sentait malade. Transmettre la manière dont on a donné du sens à sa maladie. En effet, s’efforcer à raconter une histoire, c’est donner une structure et du sens à des événements, des souvenirs. Un recueil d’anecdotes décousues ne fait pas un bon roman.
Ces anecdotes et souvenirs qu’on se rappelle de temps à autres peuvent rester flous, parce que les ordonner et les agencer n’est pas un processus dans lequel on s’engage spontanément. Mettre le vécu en récit, c’est une démarche à part entière.
Faire le récit de ce récit, ce sera en finir avec le flou du vécu, comme entreprendre de développer une pellicule photo conservée dans un placard depuis soixante ans et jamais tirée.
Annie Ernaux, L’autre fille (2011)
Pour le soignant, il faut bien entendu savoir écouter la souffrance de l’autre. Il faut savoir entrer dans une relation de partage, notamment émotionnel, tout en ne se laissant pas « contaminer » par le vécu émotionnel du patient, mais en acceptant sa propre réaction émotionnelle à ses paroles. C’est aussi considérer que le dialogue est possible.
Le commencement
Car, oui, la maladie jaillit un jour sans prévenir. Que les symptômes soient apparus brutalement ou progressivement, ils sont vécus comme pathologique quand la personne commence à y associer une souffrance et à subir des retentissements sur son quotidien. La pathologie est une rupture dans le fonctionnement habituel de la personne. Tout à coup, la vie n’est plus pareille.
Prenons l’exemple d’une maladie mentale fréquente : la dépression. Du jour au lendemain, on arrête de faire ce qu’on a toujours apprécié, les tâches du quotidien deviennent des épreuves insurmontables, on ne voit plus vraiment l’intérêt de se laver, de manger. L’être-au-monde se modifie profondément, sans même qu’on ne s’en rende compte à l’instant où cela se passe. On s’isole, il n’y a plus de plaisir à voir des proches. À quoi bon ? Là aussi, la dépression a pu s’installer progressivement, voyant diminuer les activités de la personne petit à petit. Jusqu’au jour où…
Un soir, à la place de l’avenir il n’y a plus eu que du vide.
Annie Ernaux, L’autre fille (2011)
Du vide. C’est une métaphore fréquente quand on évoque la souffrance. De manière assez paradoxale puisque c’est un vide envahissant, qui engloutit. Étienne Klein dit parfois ironiquement que le « vide, c’est ce qu’il reste quand on enlève tout le reste », ou encore « ce qui est sans être tout à fait ». Le vide n’est pas le néant.
Ce vide ne se voit pas de l’extérieur, mais on en voit les contours, il se vit. Il est souvent inénarrable, il n’y a pas de mot pour exprimer une souffrance psychique, la souffrance de la maladie, la souffrance d’être malade. On la dit indicible, on la pense indicible. Peut-être pour se protéger de la confrontation.
Mais si cette souffrance ne se dit pas, elle se décrit. Cette souffrance qui est le fondement de tout processus pathologique est malheureusement souvent négligée dans les prises en charge. Et c’est là tout l’intérêt de brosser le récit de sa maladie : sortir du tout sémiologique et recouvrer son humanité.
Mais pour mettre tout cela en récit, encore faut-il en récupérer le souvenir.
Le souvenir
Nous l’avons dit tout à l’heure, il ne s’agit pas de faire un récit de fiction. Il ne s’agit pas d’imaginer mais de se souvenir. Mais qu’est-ce que se souvenir ? Est-ce une restitution pure et parfaite, gravée dans le marbre, d’événements passés ? Un simple voyage dans le temps ?
La mémoire, c’est la vie sans l’urgence de la vie, sans la gravité, c’est l’espace sans le temps.
Panayotis Pascot, La prochaine fois que tu mordras la poussière (2023)
[Les paragraphes qui suivent sont cités ou adaptés de Vivre avec un trouble de santé mentale, M. Worms-Ehrminger (2023)]
Ce qui est délicat avec les souvenirs, c’est qu’ils peuvent tant se modifier qu’ils sont susceptibles de ne plus vraiment refléter de manière objective les événements tels qu’ils ont pu se passer, bien qu’on puisse y croire dur comme fer. Cela peut littéralement arriver à tout le monde : à force de répétitions, on croit avoir vécu des événements qu’on a en réalité imaginés et, avec le temps, on mélange de vrais souvenirs à d’autres qui n’ont pas la même temporalité, ou avec des histoires entendues.
Il nous arrive aussi de nous rappeler un événement, mais différemment de la manière dont il s’est déroulé, par exemple sous la pression ou l’intimidation. Voire de totalement l’inventer, même involontairement. Les cas rapportés durant certains interrogatoires de police ou pendant la guerre, où des personnes innocentes admettent – en finissant par y croire elles-mêmes – avoir commis un délit ou même un crime, sont bien connus.
La mémoire autobiographique et l’identité sont très fortement liées. On se construit une identité propre à partir d’un récit personnel issu de nos souvenirs. Sachant que la plupart de nos souvenirs sont au moins en partie erronés, déformés, qu’en est-il quand on essaie de se remémorer l’apparition insidieuse d’un problème de santé ?
Dans la maladie mentale, certains signes peuvent passer sous les radars pendant un bon temps. À cela s’ajoute potentiellement le déni et/ou « l’anosognosie », un mot du jargon scientifique pour dire qu’on peut ne pas être conscient que les signes sont pathologiques. Dès lors, comment se rappeler le début d’un trouble psychique dont on n’a pas eu conscience pendant plusieurs années alors qu’il existait déjà ?
Aussi, l’annonce d’une pathologie chronique, potentiellement sévère, peut représenter un traumatisme. Or, on le sait, à la suite d’un événement traumatique, les souvenirs peuvent être comme effacés. Les émotions négatives intenses qui y sont associées sont si insupportables que le cerveau semble vouloir s’en protéger en les enfouissant. Mais, ils sont là de manière latente, sans qu’on n’en ait conscience, sans qu’on se remémore la scène ni qu’on n’ait d’idée particulière en lien avec l’événement. On peut alors avoir des symptômes liés au caractère émotionnellement insupportable de ces souvenirs.
Cela dit, quand des événements sont très chargés d’un point de vue émotionnel, on peut aussi s’en souvenir de manière plus précise qu’un événement banal du quotidien. La composante émotionnelle de la formation des souvenirs est extrêmement importante. Elle est un élément de la profondeur de leur enregistrement.
[Fin des paragraphes cités ou adaptés]
Tout cela joue bien évidemment sur le vécu de la maladie et est à prendre en compte à l’écoute du récit d’un patient.
La perspective
Qui raconte ? C’est là un point important. Il arrive qu’une personne ne se rappelle pas certaines périodes de sa vie, et donc de son vécu de la maladie durant celles-ci. Par exemple, dans le cas de pathologies commençant dans l’enfance. C’est alors qu’on a coutume de demander aux proches s’ils ont des éléments à verser à ces points de suspension. Or, la question de la perspective de celui ou celle qui parle est capitale.
Selon ma cousine G., c’est C., une autre cousine, qui, un ou eux ans auparavant, m’aurait révélé ton existence et ta mort. […] Mais je n’en ai aucun souvenir.
Annie Ernaux, L’autre fille (2011)
Chacun vit les événements à sa manière.
[Les paragraphes qui suivent sont cités ou adaptés de Vivre avec un trouble de santé mentale, M. Worms-Ehrminger (2023)]
L’autrice Anne Révah m’a confié un jour n’avoir quasiment aucun souvenir précis de sa période de mélancolie délirante. Quelques éléments, la douleur notamment, mais sans plus. Elle se rappelle les mois qui ont précédé : la péricardite, la baisse d’énergie vitale. Mais aucune réminiscence des premiers symptômes délirants.
C’est son entourage qui lui a tout raconté. Ce point de vue externe transparaît dans son roman au titre évocateur L’Intime Étrangère, dans lequel le récit est narré à la deuxième personne du singulier : « tu ». Une manière de dire que le parcours a été raconté par quelqu’un d’autre que la personne qui l’a vécu dans sa chair.
Cette reconstitution est donc forcément partielle, partiale et exclusivement factuelle, et ne dit pas grand-chose de l’expérience, du ressenti. Les autres ont vu les manifestations des troubles, leurs conséquences sur le quotidien, sur les relations. Mais que savaient-ils de la souffrance qu’Anne a pu vraiment éprouver ? On peut tenter de la toucher du doigt en réfléchissant sur ce qu’on voit, mais comment en mesurer l’intensité ?
Les proches, eux aussi, souffrent, parfois intensément. Mais cette souffrance est-elle comparable quantitativement et qualitativement à celle de la personne malade ?
On peut tenter a posteriori de reconstituer son propre parcours, mais certains éléments, parfois même déterminants, manqueront nécessairement. Demander l’aide de son entourage en vue de reconstituer le déroulement des événements est délicat. Nos proches y ont assisté de manière extérieure.
Ils ont pu voir des choses, mais ne retenir que celles qui les ont marqués. Sans compter de possibles réinterprétations et modifications de leurs propres souvenirs. Beaucoup d’éléments risquent donc de passer à la trappe, là aussi. D’autant plus que les souvenirs ont souvent une coloration émotionnelle particulière, forcément subjective, et font l’objet d’une interprétation toute personnelle des événements.
En effet, l’expérience d’une même situation n’est pas la même d’une personne à une autre. Ainsi, si les proches peuvent proposer des éléments épars, cela ne dit rien du ressenti et du vécu de ces événements par la principale personne concernée.
[Fin des paragraphes cités ou adaptés]
C’est encore un point important auquel il faut prêter attention dans le récit de la maladie. Mais cela dit au moins une chose : la personne était entourée.
Le sens
Il y a cette volonté de laisser quelque chose derrière soi. Un récit à transmettre aux générations suivantes. Coucher sur le papier son expérience pour qu’elle serve à d’autres qui se retrouveront peut-être dans une situation comparable. Dire à l’autre qu’il n’est pas seul dans cette épreuve, que d’autres l’ont vécue aussi, et leur dire comment.
Oui, je crois que je ne suis pas venu au monde pour rien et qu’il y avait en moi quelque chose dont le monde ne pouvait se passer.
Rodrigue, in Le soulier de satin (Claudel, 1929)
On a coutume de parler de beau parleur, de belles paroles qui ne riment à rien, et qu’on préfèrerait des actes. Or, parler, c’est déjà agir. Agir, au fond, ça veut dire transformer un état du monde en un autre état : on transforme des ingrédients en crêpes, par exemple.
Parler c’est agir : toute chose qu’on nomme n’est déjà plus tout à fait la même, elle a perdu son innocence. Ainsi, en parlant, je dévoile la situation par mon projet même de la changer : je la dévoile à moi-même et aux autres pour la changer […]. A chaque mot que je dis, je m’engage un peu plus dans le monde, et du même coup, j’en émerge un peu davantage puisque je le dépasse vers l’avenir.
Jean-Paul Sartre, Qu’est-ce que la littérature ? (1948)
En mettant en récit son histoire, on la fait exister, on la met au monde. C’est une action très concrète, qui a un commencement, une fin, et surtout un résultat qui transforme un état du monde.
C’est pour ça aussi que les thérapies par la parole sont si utiles : ce n’est pas blablater devant un thérapeute à moitié endormi, c’est retracer son parcours et agir sur lui pour modifier son propre état de souffrance. Mais « il ne suffit pas de parler, il faut parler juste » (Lysandre, in Songe d’une nuit d’été, Shakespeare, 1600). Sans compter la fonction performative de la parole, qui peut porter dans son énoncé la concrétisation d’un acte : « que la lumière soit », « je vous déclare mari et femme », etc.
Dire son histoire a donc un sens bien présent. Cela n’est pas vain, mais cela ajoute au monde, produit une ressource, tant pour soi, pour son soignant, que pour autrui qui pourrait s’en emparer pour diverses raisons.
La reprise de pouvoir
En quoi son propre récit peut-il donc être une ressource pour la personne qui raconte ?
Dire la maladie, c’est surtout et avant tout reprendre le pouvoir sur celle-ci. Elle qui domine, qui finit par régir le quotidien. On décide de la regarder en face et d’en brosser le portrait, de parler de cette relation asymétrique. On la définit, on la nomme.
En quelque sorte, on redevient un être humain avant d’être un malade qui raconte hic et nunc. On doit nier l’emprise de la maladie pour recouvrer l’humanité. Humanité qui se caractérise par la transmission de savoirs, de savoir-faire, d’expérience. C’est cela qui a fait évoluer notre espèce et forgé notre culture.
Pour être, il a fallu que je te nie.
Annie Ernaux, L’autre fille (2011)
Chacun exprimera sa souffrance à sa manière. Chacun a son interprétation des événements, c’est aussi ça, la reprise de pouvoir, la réappropriation de son histoire.
Alors le récit peut être de telle ou telle nature, héroïque, comique, etc. Mais il faut un récit, il faut raconter, il faut relater, il faut transformer sa vie dans une chose qu’on peut dire. Nous avons tous besoin d’un récit pour exister.
Michel Serres, conférence de 2006
Se permettre d’exister, c’est aussi reprendre le pouvoir sur la prise en charge de sa santé. Comme on l’a dit, très souvent, la relation soignant-malade reste très verticale, avec une passivité contrainte du malade face au sachant qui dicte la conduite.
Dire son vécu, c’est aussi modifier ce rapport de pouvoir.
Le vécu de la narration
Michel Serres, encore lui, disait dans la même conférence que « les médecins doivent développer et entretenir parallèlement deux têtes : l’une scientifique (une médecine fondée sur les preuves), l’autre empirique (le savoir expérientiel) » et que cela vient « de la nécessité de solliciter à la fois la raison et l’expérience, d’appréhender tout autant le général et le particulier, la notion stable et la mouvance de la singularité, la maladie et la personne souffrante ».
Car, oui, la narration n’est pas un processus unilatéral. Il n’y a pas que le malade qui la vit, mais la personne qui écoute également. Il faut savoir que faire de ce matériel et l’accepter comme étant quelque chose d’utile et de valeur.
Du côté de la personne malade, la narration peut être vécue de manière ambivalente : d’un côté, on peut en ressentir le besoin mais de l’autre on craint le jugement. Mais aussi de la minimisation de la valeur de son expérience. Chaque histoire est singulière et surtout intime. Mais aussi étrangère et phénoménologiquement impénétrable par l’autre.
Je ne sais pas si j’aurai cette fois quelque chose à te dire, si c’est la peine. Si j’aurai de la honte ou de la fierté d’avoir écrit cette lettre, dont le désir de l’entreprendre me reste opaque.
Annie Ernaux, L’autre fille (2011)
Anne Révah, que j’ai déjà citée précédemment, écrivait dans Docteur, écoutez ! (coécrit avec Laurence Verneuil) que le temps d’écoute moyen que consacre le médecin à son patient pendant une consultation est… de 23 secondes ! Cette donnée qui peut paraître surprenant, a été confirmée par d’autres études (Labarthe, 2004). Il y a déjà 40 ans, après analyse de nombreuses consultations, des chercheurs se sont rendu compte que moins d’un quart des patients sont invités à parler de tous leurs symptômes (Beckman & Frankel, 1984).
Et ce qui est encore plus parlant, c’est que les médecins pensent écouter leurs patients environ 9 minutes par consultation de 20 minutes ! Alors que dans les faits, il s’agit de moins d’une minute. Sans tenir compte des multiples interruptions durant les consultations, avec plus de 6 dérangements par heure de consultation.
Il faut dire que l’expérience du patient n’est pas vraiment considérée de la même manière par la plupart des professionnels de santé, or, on sait qu’elle apporte de nombreux éléments précieux pour la compréhension de la situation et la prise en charge de la maladie.
En sortant des observations purement objectives, des scores à des échelles standardisées, on sort du dogme du modèle biomédical, qui persiste encore aujourd’hui malgré de nombreuses remises en cause. Dans ce modèle, seul le symptôme est considéré. Or, résoudre un symptôme sans que cela n’ait de conséquence concrète sur la souffrance ou la qualité de vie de la personne n’a aucun sens. Identifier la personne à une tableau de symptômes est rarement utile. Des auteurs, comme Awad & Vorugantis, postulent que la qualité de vie doit être l’objectif ultime à viser, et pas uniquement la rémission symptomatique.
Dans d’autres domaines médicaux, par exemple, en médecine du sommeil, on retrouve très souvent des patients se plaignant d’insomnies récurrentes. Or, si la réponse n’est que mécaniciste, objectivée avec des examens physiologiques, on constatera souvent que les insomnies à répétition qui ont motivé la consultation ne se retrouve pas à l’examen. On se contentera souvent d’en rester là, par manque de temps. Et pourtant, beaucoup de facteurs peuvent contribuer à ce vécu subjectif d’insomnie qui peut ne pas se retrouver dans les examens, qui se pratiquent dans un cadre très particulier. D’autant plus qu’on sait que les insomnies viennent souvent d’un cercle vicieux. C’est fréquemment l’anxiété liée à la crainte d’une insomnie qui va empêcher la personne de s’endormir.
Ces schémas de pensée nécessitent une écoute attentive pour mieux comprendre, parfois expliquer, et surtout impacter la qualité de vie de la personne qui se trouve face à un mur d’incompréhension.
On retrouve en consultation de neuropsychologie également des personnes venant consulter avec une plainte cognitive : je n’arrive plus à retenir des choses basiques, je n’arrive plus à focaliser mon attention. Et cela se ne se retrouve pas forcément aux examens. C’est un vécu subjectif à prendre en compte pour collaborer vers une prise en charge.
Narrer son expérience en 2023
Dans la pratique, les approches narratives en santé se traduisent par diverses méthodes, telles que l’utilisation de journaux, de récits verbaux ou écrits de patients, et de discussions en groupe pour explorer les expériences de maladie. Cette approche peut améliorer la qualité de la communication entre médecins et patients, réduire le sentiment de détresse chez les patients et augmenter leur satisfaction.
De nos jours, les moyens de communication, notamment numériques se sont multipliés avec l’émergence de communautés de patients sur les réseaux sociaux, par exemple. Parmi les canaux qui se développent depuis quelques années, on retrouve également les podcasts. Il s’agit de format audio disponible à la demande, la plupart du temps gratuitement, en tout lieu et à tout moment.
Il existe de nombreux podcasts dans le domaine de la santé, parlant d’expérience de patients, mais dans un impératif de temps de cerveau disponible, le format est souvent réduit et de nombreux éléments et aspects du vécu passent ainsi à la trappe. Aussi, faute de temps, beaucoup de ces émissions ne sont pas forcément présentes sur la durée, car il s’agit d’un investissement particulièrement élevé pour les producteurs, parfois bénévoles (comme l’équipe des Maux Bleus).
Le rendez-vous semble donc partiellement raté. Or, on sait que pour des pathologies dont les personnes qui en souffrent sont fortement stigmatisée, la rencontre, qu’elle soit directe ou indirecte, est le moyen le plus utile pour diminuer les attitudes négatives. Si tant est que celle-ci soit répétée…
Le cas des Maux Bleus
[Les paragraphes qui suivent sont cités ou adaptés de Vivre avec un trouble de santé mentale, M. Worms-Ehrminger (2023)]
On assiste à une augmentation de la place de la santé mentale et des troubles psychiques dans l’espace public et médiatique. Cette exposition nouvelle est-elle une bonne chose ? Si on veut être optimiste, disons que oui. Parler de dépression, de troubles bipolaires, de schizophrénie, d’anxiété permet aux personnes pas ou peu sensibilisées d’avoir un rappel fréquent de ces concepts, si tant est qu’elles y soient attentives et ouvertes.
De plus, le fait d’aborder fréquemment ces sujets diminue le sentiment d’étrangeté des troubles psychiques, donc la peur, et en conséquence la haine et la violence. C’est un effet bien connu en psychologie sociale qui s’appelle « la simple exposition », théorisé par Robert Zajonc en 1968. Un effet qui veut que plus on est exposé à quelque chose, plus cette chose nous semble familière et plus on a tendance à la voir d’un bon œil.
La simple exposition est à double tranchant, et ses effets dépendent des intentions des personnes : quel est le but poursuivi en parlant plus souvent des troubles psychiques ? Les rendre plus familiers ? Sensibiliser ? Faire de l’audience ?
Si porter un message scientifiquement fondé est bienveillant, relayer de manière virale des contenus erronés, élaborés par des personnes sans compétence dans le domaine ne l’est pas. On le voit sur TikTok, plusieurs études ont pointé la très faible qualité des contenus diffusés, portant parfois des conseils dangereux et favorisant des cas d’autodiagnostics problématiques non-suivis de consultation professionnelle de diagnostic et de prise en charge, le cas échéant, ou conduire à une forme de banalisation de la souffrance. Sous couvert de sensibiliser à la maladie mentale, on la limite à une liste de symptômes, faisant le contraire de ce qu’il serait le plus juste de faire.
Il est toujours important de savoir d’où parle un interlocuteur : qui est-il, quelle est son expertise et quel est son dessein ? Un professeur de psychiatrie intervenant dans un journal spécialisé pour évoquer les dernières recherches sur les TOC ne poursuivra sans doute pas le même objectif que le présentateur d’une émission télévisée sensationnaliste. Les deux parleront du même sujet, mais pas de la même manière. Avec des conséquences très différentes sur leurs cibles.
Le risque est également – peut-être ? – de trop en parler : les troubles psychiques pourraient être minimisés et jugés comme relevant de petits problèmes du quotidien. Si tout le monde en parle et que la plupart des gens cochent des cases de symptômes, leur gravité sera de plus en plus relativisée, et la prise en charge affaiblie en raison de cette banalisation. Pensons au tabac, banalisé et peu pris en charge, à l’inverse d’autres substances : il est pourtant la première cause de mortalité précoce évitable en France.
Autre danger : ne romançons pas la maladie mentale. Elle fait souffrir, elle impacte le quotidien et l’entourage. Et dans de trop nombreux cas, elle tue la personne qui en souffre. Donner l’illusion que tout se déroule à merveille une fois le diagnostic posé, que les prises en charge sont facilement accessibles, que les traitements fonctionnent et qu’on peut se rétablir en quelques mois n’a rien de bon, même si cela peut sembler partir d’une bonne intention. La prise en charge reste dans la plupart des cas très difficilement accessible et peut se révéler chaotique.
Nier l’existence de mauvaises pratiques et de violences institutionnelles ne sert à rien non plus. Ce sont pourtant des discours parfois portés pour essayer de donner une image plus positive des troubles psychiques. Or, l’effet pourrait être contre-productif. Imaginerait-on glamouriser le cancer et la chimiothérapie pour affirmer que les traitements sont efficaces à 100 % et qu’il n’y a pas de souffrance, d’échec, que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Tout n’est pas noir, mais tout n’est pas rose ! N’oublions pas que la maladie mentale reste une maladie invalidante comme une autre. La traiter différemment n’a aucun intérêt. C’est le meilleur moyen d’augmenter la défiance envers la psychiatrie et ses institutions.
À ce propos, un groupe d’auteurs a écrit que, « quel que soit le pays, le noyau dur des représentations associant folie et danger est enraciné dans l’imaginaire collectif, et le malade mental porte les attributs d’un fou médicalisé » (Roelandt et al., 2012).
[Fin des paragraphes cités ou adaptés]
La création du podcast
En 2021, avec notre association Place des Sciences, nous avons créé Les Maux Bleus, un podcast de témoignages pour renouer avec cette pratique de la narration du parcours de vie du témoignant. Depuis, le projet s’est beaucoup développé et a connu une reconnaissance grandissante dans le domaine de la psychiatrie et au-delà.
Partis de rien, de manière bénévole, notre association est désormais reconnue d’intérêt général et nous sommes partenaires des deux principaux congrès français de psychiatrie. Nous avons obtenu plusieurs prix, dont celui du meilleur podcast santé francophone en 2023.
Pourquoi s’être lancés dans cette aventure ?
Je venais de soutenir ma thèse, sur un sujet qui était censé être un sujet de « vie réelle », alors qu’en réalité je ne faisais que de l’analyse de bases de données. J’avais envie de rétablir ça, de m’intéresser vraiment aux personnes derrière les troubles psychiques. Ecouter et transmettre leur histoire singulière.
Donc nous avons décidé de créer un podcast, puisque c’est un des principaux formats qui émergent depuis quelques années. Le podcast permet aussi d’écouter des contenus dans l’intimité de ses écouteurs sans que personne n’ait à le savoir. Sur des sujets aussi délicats, c’est une vraie plus-value.
Dans la littérature scientifique, je l’ai dit tout à l’heure, la rencontre est le principal moteur d’une sensibilisation efficace. J’ai aussi dit qu’elle pouvait être indirecte, et c’est le cas dans un podcast. Mais encore faut-il que le message véhiculé soit approprié…
En effet, les témoignages positifs, montrant qu’il existe des possibilités de rétablissement, ont montré un impact positif important, tant sur les professionnels que sur les personnes concernées et leurs proches. Nous avons donc décidé, dans une démarche de prévention et de promotion de la santé, de nous focaliser sur cet aspect du rétablissement, sans dissimuler les difficultés que comporte le long parcours qui y mène. Il existe déjà beaucoup de choses catastrophistes, sensationnalistes, caricaturales, mais finalement assez peu de messages d’espoir.
Les objectifs étaient donc : soutenir, sensibiliser, rassembler. Ensuite la démarche de réalisation est relativement simple, à expliquer en tout cas ; la mettre en œuvre est toujours plus délicat. Elle fera l’objet d’un autre article spécifique.
En somme, nous utilisons un canal grand public pour parler au plus grand nombre. Et pourtant, notre public reste relativement homogène, des barrières culturelles s’interposant entre le récit et l’écoute.
Qui parle, qui écoute ?
[Les paragraphes qui suivent sont cités ou adaptés de Vivre avec un trouble de santé mentale, M. Worms-Ehrminger (2023)]
Nous le voyons dans les profils des auditeurs du podcast : plus de 75 % sont des auditrices, à l’image également des personnes qui viennent témoigner. Les hommes montrent un intérêt moindre pour la santé et la maladie mentale. Pourtant, ils sont autant à risque que les femmes, et leur refus d’en parler, y compris à un professionnel, détériore le pronostic et aggrave la sévérité de leurs troubles.
Reste cette question épineuse : comment intéresser et sensibiliser les personnes réfractaires à l’évocation de ces sujets, parce qu’il n’y a pas que les soignants qui sont susceptibles de ne pas s’intéresser aux récits des patients ?
La vulgarisation est un bon outil, elle a cependant aussi ses limites et ses ratés. Je vous invite à écouter la conférence d’Étienne Klein à l’Institut Diderot sur « les échecs de la vulgarisation scientifique », afin de mieux appréhender cette problématique.
Selon lui, les contenus de vulgarisation n’intéressent a priori que les personnes qui s’y intéressaient déjà. En somme, ils touchent rarement de nouveaux publics, et la vulgarisation sur un domaine reste souvent dans l’entre-soi. Ainsi, les actions de déstigmatisation n’ont pas toujours l’impact attendu, et parfois même n’en ont aucun.
Je ne souhaite pas terminer cette intervention sur une note pessimiste. En effet, au-delà des effets contre-productifs de la parole « injuste » portée sur la maladie mentale, il s’agit d’innover, de trouver de nouveaux moyens de s’adresser aux publics.
Revenons sur les témoignages comme outil de partage et de connaissances. Quel impact peuvent-ils avoir concrètement, notamment auprès des personnes qui souffrent d’une maladie mentale, de leurs proches et des professionnels ?
La parole fait-elle du bien ?
Témoigner, parler de santé mentale et de troubles psychiques en se voulant sérieux et avec la volonté d’aider à la reconnaissance des personnes en souffrance ne suffit pas. Toute communication se fonde sur la présence d’un émetteur et d’un récepteur. On peut s’intéresser aux caractéristiques de l’émetteur assez facilement. Mais qu’en est-il des récepteurs quand ils sont en grand nombre, comme les auditeurs d’un podcast ? Dans quelles dispositions sont-ils quand ils écoutent le message ?
Des études se sont penchées sur la réception d’informations se voulant positives et porteuses d’espoir par des personnes souffrant de troubles psychiques. Selon l’état dans lequel ces personnes se trouvaient, la réception n’était pas la même. Certaines appréciaient le partage d’expérience et la communication de l’espoir d’un rétablissement, tandis que d’autres se trouvaient démoralisées parce que des personnes « comme elles » (toujours cette identification à la maladie et cette distinction nous/eux…) s’en sortaient mieux qu’elles-mêmes.
On peut aussi se poser la question des effets produits sur la personne qui témoigne. Victoire Maçon Dauxerre m’a confié qu’après avoir écrit son livre autobiographique Jamais assez maigre, elle avait connu une rechute de ses troubles des conduites alimentaires. Sortir du silence a provoqué chez elle de fortes reviviscences, amplifiées par la période de promotion du livre, pendant laquelle elle devait parler sans cesse de périodes douloureuses de son histoire.
Pour Baptiste, ce fut le contraire. Écrire son témoignage sur la dépendance à l’alcool a été bénéfique et thérapeutique. Il semble d’ailleurs que ce bienfait du témoignage soit plus fréquent.
Pour Anne Révah, l’écriture de son roman autobiographique n’avait pas de vocation thérapeutique, ce n’était pas un témoignage, mais un objet littéraire forgé sur son expérience. Or, son expérience a été reçue de manière surprenante par ses collègues psychiatres : avec autant de préjugés et d’attitudes négatives que le grand public non sensibilisé aurait pu manifester.
Avec Jordan Sibeoni, ils ont d’ailleurs publié un article cet été dans le Lancet pour parler de ce retour au travail d’Anne Révah, professeure de pédopsychiatrie, autrice, cheffe de service, après son épisode de mélancolie délirante. Il est très instructif.
Ayant témoigné moi-même dans Les Maux Bleus et d’autres podcasts, je me suis senti utile pour la libération de la parole des hommes autour de la santé mentale. J’ai eu beaucoup de retours qui m’ont fait du bien. On parlait tout à l’heure de reprise de pouvoir.
Témoigner est un acte fort d’engagement, un acte presque militant, pour lequel il faut être préparé. Chacun donne un sens différent à son histoire. Mais le plus important, au-delà du sens donné, c’est d’avoir la conviction que son témoignage servira, ne serait-ce qu’à une seule personne.
Dans une étude récente (Rennick-Eglestone & al., 2019), quatre types de conséquences négatives peuvent se faire jour quand on diffuse des témoignages de rétablissement :
- Donner l’impression à des personnes en souffrance que d’autres ont mieux réussi leur parcours de rétablissement, pouvant ainsi conduire à une perte de confiance en ses propres capacités à aller mieux.
- Rester insensible à l’altérité et à la différence de vécu, et donc ne pas adhérer aux propos de la personne, ne pas s’y reconnaître. L’écoutant peut également ne pas comprendre l’intérêt de partager son histoire, et donc juger négativement cette démarche, qui peut être assimilée à une démonstration de fierté mal placée.
- Développer le pessimisme sur le degré de rétablissement atteignable, sur le rôle de la société dans l’émergence des troubles mentaux.
- Provoquer des sentiments désagréables par empathie, à l’écoute de la souffrance d’autrui, et finalement être soi-même affecté négativement.
Les effets négatifs surgissent surtout quand la personne qui écoute se sent en grande souffrance ou en situation de crise. Il est donc important de donner des ressources avant le témoignage et d’avertir les auditeurs que s’ils ne se sentent pas en mesure de recevoir ce type d’informations, ils peuvent reporter leur lecture ou leur écoute à plus tard, ou encore se faire accompagner.
Selon la même étude, sept types de conséquences positives sont apportés par la diffusion de la parole d’une personne concernée par les troubles psychiques :
- Se sentir moins seul et appartenir à une communauté de personnes vivant la même expérience.
- Normaliser le discours sur la maladie mentale par son expérience personnelle et sa dimension collective et sociétale.
- Regagner l’espoir d’aller mieux et retrouver l’optimisme dans la nature humaine.
- Donner la force et l’envie de partager sa propre expérience, convaincre qu’un changement positif est possible.
- Recontextualiser les éléments négatifs du quotidien et entendre les défis que d’autres affrontent afin de s’inspirer de leurs stratégies pour faire face.
- Diminuer la honte liée à la maladie mentale et, par-là, contribuer à la déstigmatiser.
- Changer de perspective sur soi et se détacher de son identité de malade.
On remarque que les effets positifs dépassent de loin les négatifs. Sans compter le rôle de soutien pour les aidants, mais aussi le formidable matériel que cela peut fournir aux chercheurs dans la réalisation d’études qualitatives sur le vécu de la maladie.
[Fin des paragraphes cités ou adaptés]
Il y a beaucoup de potentiel à exploiter dans le numérique en santé, comme il y a aussi beaucoup d’interrogations qui se posent autour d’un marché très lucratif avec des garde-fous à mettre en place rapidement si on veut éviter des dégâts. On voit ici quelques interrogations qui émergent pour quelque chose d’aussi simple que le partage d’un témoignage par un canal numérique.
Continuons à nous interroger, à réfléchir ensemble, à nous rassembler autour d’une table. Témoignons, oui, mais pas n’importe comment.
Faisons circuler les témoignages d’espoir, afin que des personnes sensibilisées ou non se sentent moins seules ou prennent conscience de l’importance de leur contribution.
Pour faire écho à une citation de Hannah Arendt et consolider ce dont on a parlé tout à l’heure : « les bons juste trouvés au bon moment sont de l’action » !
Écrit à partir de l’intervention de M. Worms-Ehrminger lors du colloque de la Croix Rouge sur le numérique en santé (21 novembre, Chambray-les-Tours)
Certains passage ont également été influencés par un très bel article de Véronique Lefebvre des Noëttes dans la revue Médecine et Philosophie (numéro 5, 2021).