"Je n'étais pas vraiment destinée au départ à aller vers la psychiatrie. C’est la psychiatrie qui m’a choisie finalement."

CONGRÈS DE L’ENCÉPHALE — Il y a quelques semaines, nous vous emmenions au Congrès Français de Psychiatrie pour aller à la rencontre de la diversité des métiers et des pratiques en psychiatrie. Aujourd’hui, nous vous invitons au congrès de l’Encéphale.

On le sait, la France est confrontée à une pénurie de médecins et la psychiatrie n’est pas en reste. Nous avons donc souhaité interroger plusieurs étudiants et jeunes psychiatres sur leur choix de spécialité. Ils appellent les autres étudiants à faire comme eux, choisir psychiatrie.

Nous remercions tous nos intervenants ainsi que l’équipe organisatrice du Congrès.

Bonne écoute !
Manon Combe, pour Les Maux Bleus, un podcast sur la santé mentale

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SOLÈNE

Je suis Solène Frileux, je suis cheffe de clinique à l’hôpital de Versailles en psychiatrie adulte. Chef de clinique, c’est le statut qui vient après l’internat. En fait, une fois qu’on a fini maintenant c’est 4 ans d’internat et bien on peut choisir d’être chef de clinique. En fait, c’est quand on a envie d’avoir aussi une casquette un peu universitaire, de faire de l’enseignement à la faculté et de pouvoir continuer la recherche. Et donc on peut postuler à ce type de poste dans un hôpital universitaire qui est celui de Versailles pour ma part.

La psychiatrie n’est pas toujours présentée comme aussi prestigieuse que la chirurgie, ce qui est dommage. Donc je suis passée un peu par hasard dans un stage de psychiatrie à Sainte-Anne quand j’étais externe, sans vouloir en faire ma spécialité. Et là en fait, j’ai été surprise déjà par le contact des médecins qui étaient sympathiques, qui nous accueillaient, qui faisaient attention à nous en tant qu’externe, ce qui est assez rare hein, dans l’hôpital public qui peut être assez rude parfois dans les rapports humains. Puis je me rappelle qu’y avait du Chopin dans le couloir, donc moi quand je faisais de la musique, ça m’a pas mal touché. Tout de suite, j’ai bien aimé en fait la présentation clinique des patients qui était déjà hyper variée, chaque patient était différent. Et ensuite, je trouvais qu’on avait vraiment un contact particulier avec eux, où on prenait le temps de les connaître à fond. Et comme j’ai tendance à m’intéresser à la vie des gens, je trouvais ça vraiment passionnant. En fait, c’était une histoire à chaque fois.

Me suis dit, boh, pourquoi pas, mais j’étais encore un peu prise par les enjeux de la faculté qui nous disait que la psychiatrie, c’était pour ceux qui étaient les moins bien classés. Donc j’ai fait un stage au Québec. En fait, comme super-externe, ça s’appelait à l’époque et là j’avais le choix entre gastro-entérologie et psychiatrie. Et puis pareil en fait, je je m’amusais vraiment dans le stage de psychiatrie. Les les patients avaient une présentation hyper atypique. Bon, je me suis dit « Bon pourquoi pas, laissons-nous tenter ? » Mais vraiment c’est la psychiatrie qui est venue à moi plutôt que l’inverse quoi. Pendant ma formation d’interne, donc ensuite à mon époque, moi c’était 4 ans mon premier semestre… C’était un petit peu dur, hein, parce que c’est quand même une spécialité à laquelle on est peu confrontés pendant l’externat. On la voit un petit peu dans les livres, mais sous un aspect hein, assez littéraire je dirais. Je me suis retrouvée confrontée à des patients parfois agités avec une clinique assez sévère. Donc je comprends que ça puisse faire peur aux externes qui connaissent pas la psychiatrie, mais je dirais qu’il faut juste une période d’abus. Et ensuite ? Déjà, ce qui m’a plu, c’est que j’avais l’embarras du choix pour la recherche, j’ai fait un master un en génétique, ensuite un master 2 en neurosciences. Il y avait vraiment beaucoup de thématiques qui étaient disponibles lorsqu’on souhaitait faire de la recherche. Et ensuite, moi je me suis aussi formée aux psychothérapies. Et là pareil, il y avait l’embarras du choix. En fait, moi j’ai choisi les thérapies cognitives et comportementales, maintenant je m’intéresse aux thérapies ACT. Donc acceptation and commitment therapy. Mais on peut faire de la thérapie familiale, il y a vraiment l’embarras du choix.

Ensuite, encore une fois, j’aimais bien le contact humain avec mes pairs, je trouvais que généralement il y avait une bonne ambiance avec les médecins psychiatres, bien plus que je sais pas les réanimateurs quand on les appelle pour leur demander un avis ou ou les chirurgiens, donc ça c’était super. Et puis en fait je me suis jamais ennuyée quoi. J’ai toujours été heureuse d’aller en stage parce que je savais que j’allais être surprise par le patient du jour que. Il aura jamais la même présentation que la veille. Et enfin, ça procure de grandes joies je trouve lorsqu’un patient va mieux. La première fois que j’étais confronté à des patients qui étaient un peu agités, qui étaient en rupture de traitement et qui avaient des symptômes assez sévères… Au début ? J’ai pu me sentir mal à l’aise ou même parfois sentir un peu de la peur. Mais maintenant j’ai passé un an à gérer une unité protégée, donc j’ai plus du tout ce sentiment. Et au contraire, c’est même les patients que je préfère, parce que je trouve que c’est là qu’on voit le mieux la sémiologie, les signes cliniques. Mais voilà, je trouve que ça c’est un peu un défi. Au début, ça nécessite une habituation, parce qu’ils peuvent être compliqués aussi. C’est le rapport avec des patients qui refusent, qui ne sont pas d’accord. Et il faut éviter d’adopter une position paternaliste, où on aurait tendance à dire je suis le médecin, donc c’est comme ça parce que déjà ça marche pas du tout. Mais je trouve que ça c’est un vrai défi.

Savoir composer avec les patients qui refusent les soins et qui sont en désaccord, c’est leur droit. Mais voilà, c’est tout un art. Ensuite je trouve que parfois les les rapports avec les soignants sont pas toujours évidents parce qu’on peut aussi être en désaccord. Donc il faut arriver à comprendre l’autre, se mettre à la place de l’autre et résoudre des des conflits. Donc ça c’est un vrai défi. C’est ça qui me vient surtout à l’esprit, ouais.

Quand on sait que je suis psychiatre dans une soirée, les gens demandent toujours la même chose, est ce que tu vas faire notre psychanalyse ? Donc déjà non, pas du tout. Ça c’est vraiment la question un peu bateau qui revient systématiquement. Donc ça m’a pas donné l’habitude de d’analyser les gens ou de rechercher des critères pathologiques chez eux. Non, il y a vraiment quelque chose qui est mis en tête. Quand j’attendais mon premier enfant, j’étais en stage interne en en périnatologie et on m’a beaucoup appris en fait, sur les bébés, sur le rapport entre une mère et un enfant, ça, ça m’a vraiment marqué. Et ça, ça a totalement changé la façon dont j’ai vécu ma grossesse et les premiers mois de vie de mon fils. Après, ça m’a vraiment appris l’empathie, donc se mettre à la place de quelqu’un. Enfin, j’avais déjà un tropisme pour ça hein. C’est pour ça que j’ai choisi cette spécialité, c’est que j’ai envie de de pouvoir aider l’autre à être heureux. Mais ça m’a rendue encore plus sensible à ce que peut ressentir l’autre. Et ça alors ? C’est pas toujours facile, hein ? Parce que les gens ne sont pas tous comme ça, donc. Parfois, on peut être un peu en décalage, mais en même temps, je pense que c’est une qualité.

Alors mes conseils pour les externes déjà, c’est de faire attention à ce que dit la faculté lors des conférences. Parce que le discours c’est toujours le même. Si vous êtes dernier, vous aurez juste médecine générale ou psychiatrie. Et je trouve que ça, c’est quand même un discours qui est vraiment délétère parce que la psychiatrie est une spécialité prestigieuse, difficile et méritante. On peut être fier d’être psy. Je dirais que si on hésitant, ça vaut le coup de faire des stages en psychiatrie dans des hôpitaux universitaires pour se confronter au lieu d’éviter par peur sans avoir pu expérimenter l’aspect. Je dirais que vraiment il faut faire ça si on en est convaincu. Et justement, ne pas faire ça si on est dernier parce que on voit plein d’internes qui ont choisi la psychiatrie par défaut et c’est c’est vraiment dommage. Et pour les patients et pour eux.

Moi j’aimais beaucoup la littérature, je voulais faire une hypokhâgne avant médecine. Donc je pense que si on aime les lettres, c’est vraiment une spécialité qui peut être épanouissante. Et puis je leur dirais de faire des stages en neurologie. Moi j’ai fait un semestre en neurologie, en tout cas en semestre dans une spécialité autre que la psychiatrie, une fois qu’ils sont internes. Parce que justement c’est hyper important de rester médecin. Je sais qu’il y a des externes qui ont peur de ça hein ? D’abandonner la la médecine, comme on l’apprend dans les livres quand on est psychiatre. Et je me rappelle le chef du service de neurologie qui m’avait dit d’arrêter de parler du somatique en fait parce que le cerveau fait partie du corps. On dit souvent la psychiatrie versus somatique mais non le cerveau il fait partie du corps donc faut pas parler de somatique.

Faut continuer de se considérer comme un médecin et gérer toutes les pathologies non psychiatriques de nos patients, leurs comorbidités et c’est ça qui rend la psychiatrie sympa aussi je trouve. Voilà.

ÉTIENNE

Je m’appelle Étienne, j’ai 28 ans. Pendant mes études de médecine, j’avais fait 2 stages en psychiatrie, un pendant un échange en Allemagne et un à Paris. J’avais trouvé qu’en fait les thérapeutiques avaient l’air finalement assez efficaces, qu’on avait les patients qui étaient, qui arrivaient en grande crise, en grande souffrance, on est arrivés en fait à changer les choses. Enfin, il y avait une taille d’effet, il se passait quelque chose et ça j’ai trouvé ça intéressant et j’ai trouvé les syndromes cliniques aussi, on va dire assez bouleversants. Voilà. 

Aujourd’hui, quand je discute avec ma famille, avec des gens, avec des collègues, c’est de voir un peu le chemin parcouru. Donc ça fait 3 ans que je suis interne, j’ai fait 6 semestres et c’est la capacité à, voilà, à avoir un peu un logiciel, une espèce de de compréhension interne, une espèce d’un modèle interne de comment est-ce que je travaille. Et de se dire « Bah en fait, déjà j’ai quand même appris un métier ». À chaque fois que je me repose sur mon métier, je me dis « Ah oui, tout le chemin est parcouru ». C’est quand même un beau métier et c’est quand même plein de choses intéressantes qu’on apprend. Voilà. À un moment, je pense que j’étais un peu… j’avais la gâchette un peu facile, notamment pour ma famille : ‘lui machin il est un peu parano, lui il est un peu obsess’ » ou quoi. Donc ça, ça a un peu changé, mais j’essaie d’en revenir. 

Et globalement je sais, je pense pas que ça change énormément, peut être que ça peut rendre un peu cynique, mais je pense que ça c’est quelque chose qui doit être commun à la plupart des professions médicales et qu’il faut juste faire attention à pas être usé émotionnellement par ça. On est traversé par beaucoup de questionnements en ce moment sur l’autonomie des personnes, le fait de remettre en question les pratiques, notamment les plus coercitives. C’est assez facile d’être embarqué dans des choses où  on fait pas attention au fait que ça doit vraiment être la dernière mesure et on doit le plus possible éviter que ça arrive. Et c’est de continuer à se mettre à jour. Et typiquement la psychiatrie je pense mais comme toutes les spécialités, c’est une spécialité qui est très poreuse aux évolutions de la société. Et moi je pense que c’est important de garder une flexibilité par rapport au fait que ce qu’on a appris il y a 10 ans, en fait, ça peut être totalement faux ou totalement obsolète. Ou alors on peut se rendre compte qu’en fait on a… je pense, par exemple la psychiatrie sur la question de la transidentité il y a 30 ans versus aujourd’hui, je pense qu’il y a un bilan à faire, voilà.

Je pense que si on a de l’empathie pour être médecin généraliste ou oncologue, interniste, je pense qu’on peut être tout à fait psychiatre et prendre beaucoup de plaisir. Je pense que c’est une spécialité qu’on peut investir de façon très intellectuelle aussi. Donc il faut pas du tout avoir cet a priori là que ça va être un peu vaseux, gazeux, au doigt mouillé. Je pense qu’il y a, il y a vraiment plein de choses à faire et bon alors c’est un peu kitch mais c’est d’être curieux. Voilà de lire des bouquins et de se confronter, de se confronter aux gens, pas confronter dans un rapport de force mais en plus en fait de se rendre compte que les patients psychiatriques bah déjà il y en a… enfin c’est nous tous. Et c’est hyper gratifiant de pouvoir aider des gens et de se rendre compte qu’en fait c’est des gens normaux, c’est des gens comme nous voilà !

Ce qui m’a attiré vers la psychiatrie, c’est le fait que le médecin en psychiatrie est un médecin qui prend en charge le patient dans sa totalité ou ne fait pas que un organe. On n’est pas une spécialité d’organe, même s’il u débat là-dessus, mais le cerveau est quand même notre organe de prédilection. Mais nous prenons en charge le patient dans sa globalité, dans l’entièreté même de son identité propre. 

Ce qui m’a moins plu durant ma formation d’externe et qui a d’ailleurs déterminé ce choix de faire psychiatrie, c’est le fait de faire beaucoup de triages pour les patients. On trie, on prend en charge un morceau du patient et puis après on l’envoie ailleurs pour qu’il aille faire du SSR, du long séjour, du court séjour, ce genre de chose. Alors qu’en psychiatrie pas du tout, et donc ce qui me plaît énormément en psychiatrie, c’est qu’on travaille dans une équipe extrêmement pluridisciplinaire. Et qu’on prend en charge le patient dans sa globalité, dans son être même jusqu’à son milieu de vie. On fait des visites à domicile, on voit les familles, on se pose des questions sur le patient depuis la petite enfance, même si on fait de la psychiatrie adulte. Et c’est vraiment ce qui me plaît le plus et ce que j’adore faire. Ce que pas beaucoup de psychiatrie aiment moins, c’est les gardes. J’adore les gardes, les situations un petit peu d’urgence où il faut absolument que nous on soit aux urgences pour les aider à faire certaines choses. Je trouve ça imprévisible. Et c’est plein d’adrénaline, mais c’est passionnant. 

La psychiatrie m’a profondément changé parce qu’avant d’être vraiment dans un service de psychiatrie, d’être médecin psychiatre, même si j’y suis passé quand j’étais étudiant, je me rendais vraiment pas compte de la fragilité de notre santé mentale. On se retrouve face à des personnes qui ont certes des maladies chroniques, mais il y a des personnes qui ont des états qui traversent des périodes extrêmement difficiles et qui peuvent avoir une vie similaire à la nôtre. Et là c’est vrai que ça fait vraiment réfléchir sur comment prendre soin de soi d’une manière très très très différente. On sait très bien que le stress influe  effectivement sur notre santé, mais pas au point auquel on on réalise quand on est vraiment face à ça. Quand on est médecin psychiatre, il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de défis en psychiatrie parce que nous sommes confrontés je trouve, à la société qui est un petit peu trop légitime à nous critiquer, de toutes les spécialités. C’est toujours la psychiatrie sur laquelle il faut taper. La psychiatrie elle va attacher les patients, les psychiatres, elle mettre les patients en chambre d’isolement, ce qui est complètement faux. Et donc il faut toujours lutter contre des clichés alors qu’on n’a pas tout le temps du monde pour faire non plus, donc on souffre du manque de confiance de la société, ça c’est sûr. 

Et l’autre défi qui, lui, est beaucoup plus personnel et plus quotidien, c’est les patients qui sont réfractaires au traitement. Ça, je trouve ça terrible. Les patients, on a, on a toujours envie que nos patients aillent bien et à chaque fois qu’on présente un traitement, que le patient nous fait confiance pour mettre un traitement, nous aussi on a beaucoup d’espoir là-dessus. Et quand le patient est réfractaire au traitement ou quand il y a encore une rechute, c’est très compliqué. Je pense que c’est un défi très compliqué à gérer parce que c’est un défi qui est intrinsèque à la psychiatrie puisque la psychiatrie est vraiment une spécialité de maladie mentale chronique, voilà. Le conseil que je donnerais déjà, c’est de ne pas avoir peur de la psychiatrie. Il y a beaucoup d’externes qui ne passent pas en psychiatrie parce qu’ils ont peur d’y aller, ce qui donne après des internes qui ont toujours peur des patients qui sont en psychiatrie. Et donc c’est très difficile de faire venir d’autres internes, d’autres spécialités dans les services de psychiatrie, donc de laisser de côté son jugement, les a priori qu’on peut avoir ce qui traîne de sur TikTok. Parce que toujours il y a des choses qui sont très très fausses sur TikTok sur la santé mentale. Et d’aller se faire sa propre idée, et déjà de mettre un pied dans un service de psychiatrie, ça sera, ça sera un bon point.

MERT

Bonjour, je me présente je suis Mert Ugur, interne du coup en 3e semestre de psychiatrie sur Besançon et actuellement je suis en stage à Montbéliard au sein dans un service de soins sans consentement. Donc pourquoi j’ai choisi la psychiatrie ? C’était sur un stage où j’étais en 4e année de médecine où en fait c’était la première fois que j’entrais dans un service où c’était des patients qui souffrent de psychose. Et un patient est venu en fait en courant vers moi mais s’est arrêté, il m’a fixé et après il est reparti et dans son regard j’ai vu ce qu’on appelle nous le contact psychotique et c’est là je me suis dit mais en fait qu’est ce qui se passe ? Et ça m’a ça m’a vraiment intéressé d’essayer de comprendre. Bah qu’est ce qui se passe dans le fonctionnement psychique ? Pourquoi le patient est devenu, ben… patient ? Qu’est ce qui s’est passé au cours de sa vie ? Et donc de découvrir le fonctionnement psychique, les impacts environnementaux, sociétaux, tout ce qui pouvait jouer la. 

Et j’ai eu un 2e stage en onco-pédiatrie, cette fois c’est avec les enfants. Ben voir des enfants qui souffraient de maladies qui étaient somatiques, je voyais énormément sur leur psychisme. Et comme dit enfant, pour moi c’est le futur. Donc je me suis dit Bah sur la phase d’enfant adolescent, c’est là que beaucoup de choses se jouent et c’est là que il faut aussi qu’on puisse prendre en charge, mettre des choses en place, essayer de comprendre. Bah le fonctionnement des troubles psychiques, le développement et de pouvoir interagir, bah la première chose qu’il faut faire je pense, en tout cas en tant que interne en psychiatrie, c’est de faire un travail sur soi, donc de pouvoir essayer de comprendre son propre fonctionnement psychique. Et de pouvoir ensuite valider les autres. Ben faut pouvoir trouver ce qu’ils ont besoin si ils sont en recherche d’aide et de pouvoir rapporter à leurs besoins à eux et pas en fait à ce que nous on pense qu’ils ont besoin. 

Alors que peut être que c’est pas du tout réellement la demande ? Alors moi ce qui me plait dans la formation, c’est que chaque sur chaque cas que je peux voir en psychiatrie, tout est différent. On peut retrouver bah des traumatismes, on peut retrouver des violences, on peut retrouver des souffrances, mais en fait chaque histoire de vie est différente parce que du coup chaque personne est propre, unique en soi et du coup bah rien ne sera pareil d’une personne à l’autre. Les conséquences peuvent se ressembler mais le véhicule est différent. Et moi c’est ça que je peux même dire que j’adore dans la psychiatrie, parce que je sais que chaque prise en charge va être différente, même si on peut avoir les mêmes formations pour prendre en charge telle ou telle pathologie, on sait qu’on l’appliquera différemment avec le patient qui sera face à nous. La psychiatrie c’est ça, on est là avec l’empathie, la volonté. L’idée, en prenant en fait en charge le patient dans son ensemble. C’est pas parce qu’on est dans la psychiatrie que le somatique on le met de côté, on prend en charge aussi côté somatique c’est sympa. On apprend en fait à gérer ce qu’on appelle le contre-transfert. On va être capable de gérer ses émotions sur le coup, les pensées qui peuvent nous passer parce que. D’être plus calme. Bon, ça arrive qu’on peut s’emporter aussi. Parfois, c’est… C’est humain. Mais surtout voilà cette approche là qui va être vraiment empathique par moment, des fois qu’on peut plus s’emporter, parce que du coup en fait on peut faire référence à des expériences de vie propres à nous-mêmes, et c’est là qu’en fait on, du coup, on se trouve dans la projection. Et c’est là aussi qu’on se dit qu’en fait on a aussi peut être des choses de notre côté, qu’il faut qu’on puisse prendre le temps de travailler à nouveau et qu’on peut aussi peut être mieux, aider des fois le patient parce qu’on a pu vivre. Ben des des expériences de vie qui nous sont propres et qui ressemblent à celles que le patient a pu vivre aussi. 

Moi vraiment la partie qui m’intéresse beaucoup, ça va être surtout la tranche d’âge des 15-25 ans. Parce que comme je disais au début, pour moi enfant, ado, c’est c’est futur. Donc plus on peut prendre en charge les les souffrances tôt, plus on peut mieux aider, mieux guider, en tout cas mieux encadrer un développement psychique. Et mieux je pense que sur une phase d’adulte bah les personnes seront peut être moins souffrantes. Car on pourra faire peut-être de la prévention aussi. Et à travers ça, ben y a aussi le traumatisme qui est là, qu’on envoie de plus en plus, qu’on diagnostique ça de plus en plus. Aussi l’impact des réseaux sociaux aujourd’hui, de nos jours, on voit que ça peut engendrer beaucoup de traumatismes chez les enfants, beaucoup de difficultés, au point même qu’ils se retrouvent déscolarisés. Donc moi je pense que le défi serait surtout de pouvoir trouver le bon équilibre avec l’avancée de la technologie. Et en même temps, bah, de trouver l’équilibre aussi sur l’impact psychologique qui peut jouer sur la jeunesse.

ADRIENNE

Bonjour, je m’appelle Adrienne et je suis interne en 3e semestre de psychiatrie. Ce qui m’a attirée vers la psychiatrie au départ donc déjà… des raisons personnelles, si ce n’est intimes, qui est que ma grand-mère de laquelle je suis très proche, est psychiatre et psychanalyste. Maintenant elle est retraitée mais du coup je connaissais déjà un peu ce ce milieu de la psychiatrie et de la psychanalyse, donc j’avais déjà cette idée-là. Et j’ai l’impression que parfois en médecine, la psychiatrie est un petit peu à distance des autres spécialités. Et là du coup pour moi c’était pas le cas, ça faisait partie des des spécialités sur lesquelles j’avais une une vue quoi. 

Dans la formation en psychiatrie ? Bah déjà en fait je suis passée en tant qu’externe dans un stage parce que je voulais voir. Je voulais confirmer si c’était la psychiatrie que je voulais faire ou autre chose. Et et j’ai adoré. Mon premier stage en l’occurrence c’était à la Pitié-Salpêtrière. Il y avait une équipe que je trouvais formidable et et qui m’a énormément apporté et notamment ce que j’ai aimé, c’était ce que je recherchais en psychiatrie : une ouverture sur d’autres réflexions que uniquement de la médecine. Alors je pense que la médecine doit contenir d’autres réflexions. Mais c’était un héritage philosophique, éthique, neuroscientifique, éventuellement psychanalytique. Voilà, je trouvais que c’était une vision extrêmement large et que c’est en fait c’est ça que je recherchais, moi, dans mon exercice de la médecine. 

Alors à titre là encore personnel, ça m’a transformée parce que j’avais l’impression d’avoir trouvé quelque chose qui me plaisait énormément, donc vraisemblablement une forme d’apaisement. Et j’imagine que ça a aussi changé mon rapport au monde peut être sur un version un peu plus militant. Pour l’instant, j’ai un versant militant un peu plus féministe, mais là ça c’est c’est un peu enrichi parce que je pense que c’est des patients qu’on a du coup, des patients et une une matière, enfin une spécialité qu’on a envie de défendre, pour laquelle on a envie de se battre, qu’il y ait des avancées, des fonds, éventuellement qu’il y ait d’autres solutions. Enfin voilà qu’on réfléchisse à plusieurs là-dessus. 

Bah là je viens d’assister du coup à la psychiatrie hors-les-murs, donc ça je pense que ça fait partie des défis importants, c’est à dire comment on fait pour qu’il y ait d’autres solutions que l’hospitalisation uniquement. De manière un peu plus généraliste, la déstigmatisation des patients et urgences en psychiatrie, parce que ils en souffrent sans doute. Les médecins en souffrent aussi de cette stigmatisation de de cette spécialité. J’ai l’impression que la psychiatrie donc c’est à la fois c’est une spécialité qui est vraiment l’entrecroisement de plusieurs matières, plusieurs réflexions. Je pense aussi que c’est la spécialité où on a le lien avec le patient pour moi le plus fort dans mon expérience en tout cas d’externe j’ai trouvé que c’était là où on avait sans doute lien extrêmement important. 

C’est encore un champ de spécialités où tout n’est pas encore protocolisé, c’est à dire qui d’une part qui reste assez large, on n’est pas encore sur-spécialisé et ça ça c’est vraiment super. Au congrès, j’aime bien le fait qu’on rencontre pas mal de de gens. J’aime bien, y a des idées souvent assez innovantes. Là par exemple moi j’étais venu chercher ces ces informations sur psychiatrie hors les murs que je connaissais pas du tout. Donc voilà des sujets de réflexion, des ouvertures…

LOUVAINE

Bonjour, je m’appelle Louvaine, je suis interne en psychiatrie en 5e semestre. Initialement, je ne m’orientais pas du tout vers la psychiatrie. Au départ, quand j’ai commencé médecine, c’était pour faire soit de la pédiatrie ou de la gynéco. Je me suis juste laissée porter par mes stages. J’ai fait un stage en oncologie qui m’a beaucoup plu et en fait j’étais beaucoup en relation avec le patient. En fait cette proximité avec le patient ça m’a beaucoup intéressée. Ensuite je suis passée en psychiatrie durant mes stages. Au début je me disais bah c’est bien mais je me vois plus être med gé et avoir cet abord où je sais que je peux être en proximité avec le patient. Et finalement de fil en aiguille, ben je me suis rendu compte que c’est ce qui me plaisait. Donc j’étais pas vraiment destinée au départ à aller vers la psychiatrie. C’est la psychiatrie qui m’a choisie finalement. 

C’est la première fois que j’ai vraiment pris en charge une patiente jeune de 18 ans, on a posé le diagnostic de schizophrénie. Et elle a été hospitalisée après une bouffée délirante aiguë. Elle est restée beaucoup de temps à l’hôpital, beaucoup de temps en isolée. Et c’est vraiment ce processus de l’introduction du traitement, la psychoéducation déjà, voir les symptômes diminuer enfin, c’est… C’est époustouflant en fait de voir à quel point, en tant que psychiatre, on peut sauver vraiment des vies. On peut vraiment aider des gens à se sentir mieux, à se réinsérer dans la vie afin à reprendre en main leur vie. Et je me suis rendu compte là à ce moment-là, à quel point la psychiatrie avait toute sa place en fait dans la société et à quel point c’était important en fait de pouvoir soigner, sensibiliser, informer également. Puisque je pense également qu’il y a pas mal de jeunes, là je parle d’une bouffée délirante, donc c’était obligé qu’elle passe par ce circuit. Mais finalement, il y a beaucoup de personnes dans la population générale qui souffrent, où c’est très insidieux, qui ne consultent pas forcément et avec des retards diagnostiques hyper importants. Enfin voilà, c’est c’est principalement ça qui m’a marquée et je me suis dit, enfin vraiment, faut qu’on faut qu’on parle plus de la psychiatrie. 

Il a fallu que je change également mon regard sur ben en fait quand on est malade, on le choisit pas, ça c’est c’est clair et net que beaucoup de personnes peuvent le véhiculer. En fait avant que je rentre en psychiatrie, j’avais vraiment cette vision que effectivement bah un peu comme si tous ces trucs New Age, genre développement personnel, où quand tu veux tu peux, voilà il suffit de le vouloir pour le pouvoir, bouge toi un peu… enfin je ne le disais pas mais intérieurement je l’avais quand même intégré. Et c’est des messages que je pouvais avoir en background. Et la psychiatrie m’a confrontée en fait à la vraie réalité des personnes qui souffrent d’une pathologie mentale. 

C’est un réel défi à mon sens, c’est pas si facile finalement que ça dans un monde, on a l’impression qu’on parle de plus en plus de santé mentale, de vraiment parler de la maladie mentale. C’est un vrai défi en fait de parler de la maladie mentale et de faire en sorte que les gens puissent vraiment comprendre ce que ça représente, de réellement déstigmatiser, de réellement être empathique envers les personnes qui souffrent, de vraiment bien communiquer. 

Il y a beaucoup de de préjugés sur la psychiatrie. Enfin, quand on on entend parler de la psychiatrie, c’est toujours la plupart du temps en négatif. En fait, c’est une très belle spécialité, mais vraiment, c’est très vaste. On peut prendre en charge les patients qui souffrent effectivement de dépression, de troubles anxieux, de troubles de stress post-traumatique, de troubles bipolaires, de de troubles schizophréniques. Et là je parle que des pathologies, on va dire de jeunes adultes et adultes, mais il y a également toutes les pathologies durant l’enfance. C’est c’est vraiment hyper riche et en fait il faut s’y intéresser. C’est une spécialité qui évolue avec notre temps finalement, et il y a, il y a tout à construire. Et en fait, on a besoin du coup de psychiatres qui soient là pour faire évoluer les choses en fait.

Vous avez des idées suicidaires ?

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